ATTENTE

  • Peinture
  • huile s/toile
  • 1983
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Cognac 1983 Huile s/toile 

Collection privée

IN TEMPORALIBUS

par
Robert VIGNEAU

IN TEMPORALIBUS : les affaires de ce monde-ci les choses de l'existence. Ainsi les Papes, souverains temporeis, designaient-ils les contingences de leurs Etats-Pontifi­caux par opposition aux dogmes éternels dont, chefs spiri­tuels, ils étaient garants. Ainsi Niala a-t-il décidé d'intituler la série de 33 œuvres (Huiles, acrylo-vinyliques, collages) qu'il a commencé à peindre durant les inondations de Décembre 1982. Constat du monde tel qu'il est ? Le choix du latin lan­gue classique, langue d'église, n'est pas indifférent ; l'artiste indique par là qu'il juge cette série exemplaire dans son œuvre dont on s'apercevra bien un jour qu'elle est tendue d'une sorte d'effusion en définitive religieuse.

Pourtant les toiles exécutées pendant le premier tri­mestre 1983 contrastent avec tout ce gui faisait le charme solaire, sanguin et musical du peintre. Auparavant, les tableaux de Niala étaient comme des fêtes ; des jaillisse­ments, les assises terriennes, cette majesté de mosaïque qu'on prête aux grands primitifs ; colorés, sensuels et bon enfant ils donnaient envie de danser. Soudain, tout bascule : les cou­leurs deviennent froides, sombres ; les formes se déchiquè­rent en drames échevelés ; l'inspiration se fait aussi nocturne et désespérée qu'elle était, naguère, lumineuse et jubilante.

Cette crise commence dans la vie de Niala lors de l'épouvantable nuit du 23 au 24 Décembre 82, quand la Charente, débordant, inonde la maison habitée par l'artiste et les siens, les obligeant à fuir, à abandonner toutes ces « choses de la vie » gui font un foyer, le cadre d'un être et d'une famille. La ruine en quelques heures. Et pas seulement la ruine matérielle, dommage financier relativement réparable, mais la ruine du passé, collections personnelles, cartons et travaux, et cahiers, et documents, papiers, archives, tout ce dont se nourrit une création picturale. Tout emporté, sac­cagé, perdu.

Les eaux, c'est l'apocalyse insidieuse. Une fin tragi­que, cela s'imaginerait plutôt dans le feu qui a, lui, le pana­che, la belle violence souveraine des flammes. Le feu , vie outrée, est dieu, taureau ou démon mais toujours splendide, croit-on. Les eaux, elles, sont froides et mesquines. Et aussi : insinuantes, rampantes, cafardes, insaisissables, hypocrites, inexorables, inépuisables, molles, aveugles. L'effroi gb1cé. Elles cachent leur force, qui est la plus considérable et laissent démuni qui veut les combattre. Elles ont vraiment le visage de la mort.

Ainsi l'inondation dépouille-t-elle l'artiste jusqu'à l'âme, elle l'amène à se poser les cruelles questions fonda­mentales : qui es-tu ? Où allons-nous ? On songe à l'itiné­raire de Gauguin, à la crise qui fit prendre à l'inspiration de Goya son tour sombre et violent, on songe aux événements gui forcent les créateurs à s'avouer, parfois malgré eux, leurs visions les plus hallucinées, les plus profondes. L'esprit, les interrogations qui dirigent les tableaux peints par Niala au début de 1983, proviennent donc de ce grand déluge : c'est un dénuement lyrique.

Une fois surmontée, l'épreuve des eaux agit donc comme un sacrement - ou une initiation, Ce grand accès de désespoir et de colère aura permis de faire naître le nouvel individu en ferveur plus accomplie. Printemps 83, saison nouvelle mais aussi renouveau personnel qui se confirme par les dernières œuvres de la série gui signent l'avènement d'une nouvelle humanité. 

Mars 1983

"Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'artiste ou de ses ayants droit est interdite"

 

  • Technique : Peinture (huile s/toile)
  • Année de réalisation : 1983

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